Autrefois documentaliste à Metz, Marianne vit en Espagne depuis 25 ans, et elle nous parle de littérature galicienne et de la guerre civile dans les romans et les BD espagnols d’aujourd’hui.
Marianne, peux-tu te présenter ?
J’habite en Espagne depuis maintenant 25 ans ! Je suis arrivée en Galice, région qui se situe à l’ouest de la Péninsule ibérique, juste au nord du Portugal, pour occuper un poste de lectrice de français à l’École Normale d’Ourense.
J’ai enseigné ensuite le français à la Faculté de Traduction et d’Interprétation de Vigo. Puis j’ai réussi le concours d’instituteurs et découvert une nouvelle passion : enseigner à des enfants de 6 à 12 ans. Les débuts n’ont pas été faciles surtout en ce qui concerne la langue car ici en Galice, les gens parlent deux langues officielles, le l’espagnol et le galicien. Ma première difficulté a été d’apprendre cette langue et surtout de la pratiquer quotidiennement dans mon école.
J’alterne mes lectures en français, en espagnol et en galicien. J’aime découvrir de nouveaux auteurs surtout ceux de Galice. Quelques-uns sont traduits en français depuis longtemps comme Gonzalo Torrente Ballester (La saga/fuga de J.B.), Camilo José Cela, prix Nobel de littérature en 1989 (La ruche, La famille de Pascual Duarte).
La littérature galicienne actuelle est très riche mais malheureusement peu connue au-delà des frontières car peu traduite contrairement aux auteurs catalans comme Carlos Ruiz Zafón, Manuel Vázquez Montalbán ou encore Eduardo Mendoza.
En langue castillane, mes préférences vont aux auteurs qui retracent l’histoire de la guerre civile, thème qui intéresse une génération d’auteurs de plus en plus nombreux, parmi eux : Almudena Grandes, Víctor del Árbol et Dulce Chacón.
Almudena Grandes, « Le cœur glacé », retrace 70 ans d’histoire de l’Espagne à travers le destin personnel de deux familles aux idéologies totalement opposées.
« Inés et la joie » premier tome d’une série de 6 livres « Épisodes d’une guerre interminable » qui retrace l’histoire récente de l’Espagne, la Guerre Civile, la clandestinité dans les maquis, la dictature et la répression franquiste.
Les 2 tomes suivants sont traduits en français : « Le lecteur de Jules Verne », « Les trois mariages de Manolita »
Víctor del Árbol : Toutes les vagues de l’océan (Actes Sud), une histoire familiale avec en toile de fond l’histoire de l’Espagne au 20ème siècle de Barcelone au goulag de l’île de Nazino en passant par la Guerre Civile espagnole.
Dulce Chacón: Voix endormies (10/18)
Écrivain engagée, à la fois romancière, poète et dramaturge, elle a consacré plusieurs de ses œuvres au travail de mémoire sur la guerre d’Espagne.
Voix endormies (La voz dormida), récit de femmes républicaines dans les prisons franquistes pendant et après la guerre civile a connu un immense succès en Espagne où il a été élu Livre de l’année 2003.
Quelques BD maintenant sur le même sujet :
L’art de voler – Antonio Altarriba et Kim (Denoël Graphic)
Les temps mauvais: Madrid 1936-1939 – Carlos Giménez (Audie Fluide glacial)
Ermo – Bruno Loth (Libre d’images), Dolorès – Bruno Loth (La boite à bulles)
Existe-t-il actuellement une littérature galicienne, en langue galicienne ?
Bien-sur, elle est même très riche. Parmi les romans qui m’ont enthousiasmée, je retiens en particulier :
Los libros arden mal (L’éclat dans l’abîme– Mémoire d’un autodafé- Folio Gallimard) de Manuel Rivas
1936, les phalangistes organisent un autodafé de livres proscrits par le nouveau régime de bibliothèques privées et publiques de La Corogne. Mais les livres brûlent mal (Los libros arden mal- titre en castillan) et les feuilles s’envolent, prétexte poétique de l’auteur pour nous raconter l’histoire de plusieurs personnages anti-franquistes comme Santigo Casares, leader républicain qui devra s’exiler en France avec sa fille María Casares, future actrice de cinéma et de théâtre.
Sur le même thème (la guerre civile et la répression en Galice), on pourra lire aussi , de Manuel Rivas, toujours : Le crayon du charpentier et La langue des papillons (Gallimard).
L’un des auteurs les plus prolifiques est Agustín Fernández Paz qui écrit dans les deux langues de Galice, mais n’est malheureusement traduit en français que pour un seul roman, pour les enfants : le livre des petites annonces.
J’aimerais aussi présenter mon ami Santiago Lopo qui a écrit 4 livres, qui ont tous reçu une critique élogieuse et obtenu un prix ici en Galice. Espérons qu’il seront bientôt édités en France :
Hora zulú, un roman-puzzle composé de textes d’origine très diverses : rapports médicaux et ses annexes, poésies, courriers électroniques qui racontent la quête d’identité d’un homme amnésique. Plusieurs scènes se déroulent en Bretagne. A diagonal dos tolos (la diagonale des fous) qui a pour thème centrale la révolte des esclaves marrons à la Réunion.
Est-ce que les espagnols, comme les français, adorent les polars ?
Oui oui, et moi-même je suis en train de découvrir ce genre.
Ce sont Dolorès Redondo et Victor del Arbol qui m’ont initiée, sur recommandation de mes collègues et amis.
Dolores REDONDO
La trilogie de Batzan : Le gardien invisible, Une offrande à la tempête, De chair et d’os
Ces polars me font penser à ceux de Camilla Läckberg où histoire personnelle et professionnelle de l’enquêteuse s’entremêlent. Une inspectrice de police enquête sur des crimes commis dans une région de Navarre où les croyances ancestrales jouent un rôle primordial dans les résultats de l’enquête.
Mais alors Marianne, tu ne lis plus jamais d’auteurs français ????
Mais si bien-sûr, je les lis parfois même indifféremment en français, en espagnol, ou en galicien.
Mes préférés, lus récemment :
Pierre Lemaitre : Vestido de novia (Robe de marié) et Nos vemos allá arriba (Au revoir là-haut), Irène NIMÉROVSKY : Suite francesa (Suite française) et El baile (le bal), Philippe CLAUDEL : A neta do Señor Linh (la petite fille de M. Linh), Muriel BARBERY : A elegancia do erizo (l’élégance du hérisson), Joel DICKER La verdad sobre el caso Harry Quebert (La vérité sur l’affaire Harry Quebert).
1 septembre 2016 à 21h46
bien bravo c’est super
Ça donne envie catchounette
Achille tendon le frère à marianne
17 août 2018 à 21h38
Bonjour,
Je recherche Marianne depuis des années. Je suis une de ses amies du lycée Jeanne D’Arc à Nancy. Pourriez-vous lui transmettre mon adresse svp?
patricia-didier@wanadoo.fr
Merci pour votre aide.
Cordialement
Patricia Bronner