Avec les élections présidentielles américaines, les regards des européens se sont plus que jamais tournés vers les États-Unis, ce qui n’est pas forcément le cas dans l’autre sens. En matière de littérature, voici quelques allers-retours en quelques titres parus en 2024.

Douglas Kennedy, un américain très européen

Douglas Kennedy, né en 1955 à New York. En 1974, il décide de poursuivre ses études un an au Trinity College de Dublin De retour à New York, il devient régisseur dans des théâtres de Broadway. En mars 1977, entre deux productions, il décide de partir à Dublin pour rendre visite à des amis. Il restera en Europe. En 1983, après 5 années au Théâtre national d’Irlande, il démissionne  pour se consacrer exclusivement à l’écriture. Pour survivre, il devient journaliste indépendant, notamment pour The Irish Times où il tient une rubrique de 1984 à 1986. En mars 1988, il emménage à Londres, au moment où son premier livre, un récit de voyage (Au-delà des pyramides) est publié. Parfaitement francophone, Douglas Kennedy vit aujourd’hui entre Londres, Paris, Berlin et Wiscasset dans l’État du Maine. Douglas Kennedy reste un écrivain américain qui décrit de manière très acerbe certains aspects des États-Unis. Il dénonce notamment leur puritanisme.

« Je critique dans mes livres la société américaine mais, par les thèmes de mes romans, j’appartiens au fond totalement à cette société ». « Tous mes romans ont pour thème le gouffre qui existe entre la mentalité américaine et européenne. » (wikipedia)

Pendant un séjour en France à l’occasion d’un salon littéraire, Douglas Kennedy est apostrophé par une écrivaine qui lui dit le trouver plutôt raffiné pour un Américain. L’auteur, piqué au vif, s’interroge sur l’identité américaine, se remémorant les événements marquants de sa vie et explorant la richesse ainsi que les contradictions d’un pays plus désuni que jamais. Etre américain c’est quoi ? s’interroge-t-il dans « Ailleurs c’est moi« . Du New York d’après guerre à une petite ville texane trumpiste, de souvenirs d’enfance en réflexions politiques, d’anecdotes hilarantes en citations littéraires, de notes de jazz en films inoubliables, un voyage étourdissant, passionnant, édifiant, drôle, émouvant, avec un guide de luxe : Douglas Kennedy himself… (Belfond, 2024, traduit de l’américain par Chloé Royer)

L’Europe, terre d’asile pour pour écrivains américains ?

Dans la mesure où les triggers warning et une censure puritaine limitent de plus en plus l’accès à la littérature aux États-Unis, des auteurs américains regardent vers l’Europe. « Pour Jake Hinkson, Peter Farris ou encore Benjamin Whitmer, qui ont trouvé refuge chez Gallmeister, la France est devenue une terre d’asile. Même chose chez Liana Levi pour Eddy Harris, Iain Levison et Seth Greenland. Ce dernier raconte : « Dans mon roman Plan américain, l’un des personnages est une Noire. Mais le climat culturel actuel décourage fortement les écrivains blancs à créer des personnages noirs. Mon livre n’a pas été refusé aux États-Unis car il n’a pas été soumis à aucun éditeur. Mon agent est convaincu que non seulement il serait rejeté, mais qu’il nous causerait des problèmes à tous les deux ». « (source Le Monde du 18/09/2024 : « Entre écrivains européens et américains, une relation inégalitaire et paradoxale« ).

L’Amérique des Etats-Unis, fascinante ou effrayante ?

L’Amérique faisait toujours rêver dans les années 1980, si l’on en croit Marc Dugain qui met beaucoup de lui-même dans L’avion, Poutine, l’Amérique et moi.  Lorsqu’un drame familial bouleverse son existence, le narrateur, Français employé dans une grande banque américaine, quitte les États-Unis pour Genève, où il est chargé de développer les affaires avec la Russie communiste, qui vit ses derniers mois. mais il est peu confortable de se retrouver coincé entre influences de l’Est et de l’Ouest…

Dans L’horloger, premier roman de Jérémie Claes, chroniqueur belge, un universitaire new-yorkais s’est réfugié avec son fils à Gourdon, petit village de Provence, après l’assassinat de sa femme par des néonazis qu’il avait contribué à faire arrêter. Quand il apprend que les membres de sa famille, éparpillés à travers les États-Unis, sont tous morts au même moment, il enquête en compagnie d’un vieux policier anarchiste. Un thriller un peu cliché mais très efficace, qui nous entraîne de la Louisiane à Bruxelles, de la Patagonie à Paris.

Enfin ce sont sûrement des dystopies comme celle de Sinclair Lewis, Impossible ici (1930) ou de Margaret Atwood, La servante écarlate (1987) qui continuent à faire des États-Unis une puissante source d’inspiration dans le monde que nous vivons. Le dernier recueil de nouvelles de l’auteur de thrillers norvégien Jo Nesbø, Rat Island, est un mélange fascinant de sociétés dystopiques et de dilemmes moraux. La nouvelle qui donne son titre au recueil se déroule dans des États-Unis post-pandémiques. L’auteur évoque un futur indéterminé et étrange dans lequel la vengeance, le pouvoir et le progrès scientifique prédominent et les individus sont traversés par la violence et le cynisme.

Avec 84K, le dernier roman de Claire North, autrice britannique, nous voici dans une Angleterre dystopique où la justice est privatisée et où The Company contrôle tout. Théo Miller employé au Bureau d’audit des crimes, évalue au centime près la valeur des personnes assassinées et s’assure que les criminels remboursent intégralement cette somme. Sa vie bascule quand il découvre qu’un de ses dossiers est celui de son amour d’enfance…