De quel côté êtes-vous ? Faites-vous les beignets ou les mangez-vous ? Vous déguisez-vous ou assistez-vous à la parade ? Faites-vous la fête ou remettez-vous le monde en question ? Si le Carnaval est un décor agité privilégié dans de nombreux romans (souvent policiers), il peut aussi être le point de départ de bouleversements plus profonds.
Du Carnaval au carnavalesque en littérature
Carnavalesque signifie « relatif au carnaval », cette fête colorée et enfiévrée aux dates mouvantes durant la période hivernale, et ceci de très longue tradition.
Etudiant Rabelais et la culture populaire, « le théoricien littéraire Mikhaïl Bakhtine lui a donné un sens plus large et plus profond : le carnavalesque désigne un renversement temporaire des hiérarchies et des valeurs dont le carnaval fournit un exemple particulièrement frappant. » « Ce terme est aussi employé en sciences humaines comme concept d’analyse de certains phénomènes sociaux. » (Wikipedia).
Globalement « carnavalesque » exprime l’idée essentielle d’un temps destructeur et régénérateur. Du carnaval au carnavalesque, voici 3 titres pour accompagner cette réflexion. Leurs auteurs aux parcours originaux nous emmènent sur des chemins inattendus.
« J’ai trouvé une porte pour sortir de prison, elle ouvre sur la liberté et je t’écris ceci pour te la montrer. »
Sur une île mystérieuse au large du Danemark, un drame s’est produit. Le pasteur et sa femme, deux personnalités centrales de la vie de la communauté, ont disparu. Leur fils, Peter, surdoué et curieux de tout, et sa soeur, la très perspicace Tilte, se lancent à leur recherche. Commence alors une épopée rythmée, une aventure carnavalesque jalonnée de rencontres cocasses et insolites.
« Les enfants des cornacs » est une fable philosophique initiatique, où divers milieux et croyances se croisent et se confrontent. Guidé par la voix de Peter à travers un univers fabuleux, le lecteur découvre ce qu’il se passe lorsque les enfants décident d’assumer les responsabilités de leurs parents.
Peter Høeg est né en 1957 au Danemark et sera successivement danseur classique, escrimeur, acteur et marin avant de se consacrer à l’écriture. Il connaît le succès avec son premier roman, « L’Histoire des rêves danois», où il présente des personnages qui tiennent le Danemark pour le centre du monde. L’auteur de « Smilla et l’amour de la neige» renoue ici avec son grand talent pour mettre en images et en situations, non sans humour, une quête spirituelle à la fois légère et profonde. (Editions Actes sud)
« Mettez-moi les anges encore plus fort ! À plein tube ! »
Stanislav Perfetskyi, figure de l’underground ukrainien, poète et auteur de performances littéraires bruyantes et audacieuses, est invité dans un symposium international à Venise. Celui-ci porte sur « l’absurdité post-carnavalesque du monde ». En route pour l’Italie, il rencontre de mystérieux bohémiens qui le retiennent à Munich, goûte à toutes sortes d’alcools, s’adonne à sa passion pour la musique, et tombe amoureux d’une femme envoyée pour l’espionner. Arrivé à bon port, Perfetskyi donne une conférence sur l’Ukraine et les Ukrainiens, puis il disparaît, laissant la fenêtre de sa chambre d’hôtel ouverte sur le Grand Canal. Que lui est-il arrivé ? Est-il possible que ce maître des masques, des dissimulations et autres « Perversions », ait organisé sa propre disparition ? Une chose est certaine : ce que l’on nomme la « réalité » disparaît dans les brumes, les aventures burlesques se succèdent à un rythme effréné sous l’œil étonné de la Sérénissime, et le surnaturel prend peu à peu le contrôle du monde.
Né en 1960 en Ukraine occidentale, Yuri Andrukhovych est l’une des figures les plus populaires de la littérature ukrainienne contemporaine. Poète, essayiste, romancier, performeur, il a fondé le groupe de performances littéraires Bu-Ba-Bu (Burlesque-Balagan-Bouffonnade). (Editions Noir sur Blanc)
« Le bonheur n’aime pas qu’on lui mette la main dessus, mon trésor. Laisse-le filer. Il sera content de te revenir. »
En 1575, lors d’un « carnaval noir« à Venise, un peintre et un évêque sont retrouvés morts. En 2016, Bénédict Hugues, professeur de latin médiéval à l’université de Genève, trouve une lettre écrite en 1574 par l’évêque disparu. Redoutant des attentats djihadistes visant le pape, Bénédict entame une enquête sur les événements du carnaval noir, qui entrent en résonance avec les événements présents. À croire que l’Histoire se répète éternellement, que le combat entre le fanatisme et la raison n’en finit jamais, et que la folie des hommes est sans limite…
Metin Arditi, né en Turquie, est un écrivain suisse francophone. Physicien, diplomé du Polytehnicum de Lausanne et de Stanford, il a enseigné la physique et l’économie… mais aussi l’écriture romanesque. Il a présidé l’Orchestre de la Suisse Normande, a créé plusieurs fondations, dont la Fondation pour le dialogue interculturel et la Fondation Pôle autisme.
Trêve de réflexions, il est grand temps de mettre un masque et d’entrer dans la cavalcade !