Après l’interview de Delphine et Maeva, bibliothécaires à Lingolsheim, voici le récit à la première personne de Marie, bibliothécaire à la médiathèque du Neuhof. Elle y a récemment rencontré, avec son collègue Mustapha et l’écrivain Velibor Čolić, un groupe d’élèves du Centre Socio-Culturel (CSC) Lupovino pour la troisième et dernière fois. Elle revient pour Myriades sur les deux premières rencontres, en décembre dernier.
Velibor Čolić au CSC Lupovino – actes 1 et 2 : Impressions complètement subjectives
« Ce matin de décembre où nous sommes allé.e.s à la rencontre d’un groupe d’apprenant.e.s en français, il y avait, il faut l’avouer, un peu d’inquiétude chez moi : le devenir de cette rencontre n’était absolument pas entre nos mains de bibliothécaires… Nous étions juste ici ceux qui rendions la chose possible.
Mustapha avait joint Eva, la très chouette formatrice français langues étrangères (FLE) du CSC Lupovino. Rendez-vous était pris avec un groupe que nous ne connaissions pas.
Comme la rencontre avec Eva s’était très bien passée, nous étions en confiance : la certitude était là qu’elle aurait pris son rôle à cœur et que le groupe ne serait pas étonné de nous voir arriver dans leur quotidien.
Velibor Čolić, auteur-intervenant de cette matinée, avait quant à lui noté le rendez-vous sur son agenda et voilà, c’était prêt !
Où il est question de papillons, de fables et de lointains parents du Père Fouettard
Alors, les petits papillons s’amusaient bien dans mon ventre : je ne maîtrisais rien d’une rencontre dont l’objectif était que chacun.e se raconte… Sensation assez inhabituelle en tant que bibliothécaire où l’on a tendance à préparer beaucoup d’animations nous-mêmes.
Une petite voix me disait « Un grand bonhomme comme lui pourrait être limite inquiétant, du haut de son mètre 95, avec sa grosse voix, avec le métier prestigieux d’auteur comme carte de visite… »
Une fois sur place, les doutes ont disparu comme par enchantement : Velibor a réussi à créer une atmosphère de confiance et de simplicité où les mots qu’on ne trouve pas ne sont pas importants. Seules comptaient maintenant la rencontre entre lui, 3 hommes et 7 femmes venus des quatre coins de l’Europe et de l’Afrique…
C’est donc avec beaucoup de bienveillance et de sourires que le premier rendez-vous a eu lieu. Nous avons pris le temps de nous présenter les un.e.s aux autres : d’où nous venons ? depuis quand nous sommes à Strasbourg ? Et après, les langues se sont déliées, les mots et les anecdotes sont arrivés, cette fois-ci autour de l’apprentissage du français.
On y a appris qu’un jeune homme syrien à son arrivée en France a visité la Tour Montparnasse alors qu’il souhaitait se rendre à … Tours. Il y fut aussi question d’une jeune marocaine inquiète pour la validité de son passeport qui a demandé dans son français de débutante à des policiers en faction : « Est-ce que vous m’aidez et me dire s’il est mort ? » et failli déclencher une intervention dans la préfecture.
La deuxième rencontre donnait l’impression que nous nous connaissions déjà depuis longtemps, comme si parler d’un bout de notre histoire, nous avait rapprochés à vitesse grand V.
Cette fois, ce sont les blagues et les histoires que l’on compte aux petit.e.s que nous avons échangées.
Nous avons donc découvert « Le lièvre et le caméleon », histoire angolaise qui est librement inspirée de La Fontaine (ou est-ce le contraire ?) ; échangé sur toutes les créatures que les parents invoquent le soir pour faire peur aux enfants et leur demander le calme : « Fais attention sinon le Boro (berbère) viendra, l’Aou (syrien), le Goula (marocain et algérien) te mangera… »
C’est un cadeau hors du commun de pouvoir vivre ces instants uniques d’humanité en tant que bibliothécaire…
Si l’évocation des histoires d’enfance n’était pas simple au départ, nous avons ensuite beaucoup rit et chacun.e avait l’air regonflé.e de se rappeler ces moments.
Une rencontre reste à vivre en janvier pour profiter de ces moments magiques entre un auteur impressionnant et engagé, une formatrice FLE attentive et motivée et des femmes et hommes aux histoires singulières !
Et mon sentiment intime, c’est que c’est un cadeau hors du commun de pouvoir vivre ces instants uniques d’humanité en tant que bibliothécaire. »
Un grand merci à Marie pour ce témoignage ! A noter que la dernière rencontre, le 11 janvier, a été suivie par la journaliste des DNA Véneranda Paladino (si vous voulez lire ce superbe article, c’est dans l’édition du 12/01/2018)
1 Pingback