Depuis quelques semaines nous accueillons Deontavious en stage à la médiathèque André Malraux. Il est étudiant en Littérature française à l’Université de Amherst, Massachusetts, et est venu à Strasbourg cet automne pour étudier la littérature et l’art en France, au Centre de l’Université de Syracuse à Strasbourg.

Deontavious, qu’est-ce qui vous a plu à Strasbourg ?

« J’ai été surpris par la manière de manger : ils ne vont pas vite, prennent le temps, avec les amis. J’ai aimé visiter l’île, l’Esplanade, la Krutenau, j’aime les parcs à Strasbourg, le parc de la Citadelle, de l’Orangerie. Je n’aime pas l’obscurité de l’hiver, mais c’est pareil aux Etats-Unis ! »

Est-ce que c’est facile d’apprendre le français ?

« Le plus difficile pour moi pour apprendre le français, c’est le genre des noms, la prononciation des R. Je me suis habitué à l’accent du français ici (sauf un guide en visitant Hatmannwillerkopf, mais je ne connais pas son origine…). J’ai eu du mal avec l’accent du sud ouest quand je suis allé visiter une autre partie de la France. »

Qu’est-ce qui est différent des Etats-Unis en Europe ?

« En Europe je suis aussi allé au Royaume-Uni quand j’avais 14 ans, avec mon père. Les bus à deux étages m’ont paru bizarre. Les Etats-Unis n’ont pas de système de transport publics comme beaucoup de pays en Europe et comme à Strasbourg. J’ai aussi été surpris par la façon d’ouvrir les fenêtres ici, difficile de savoir comment tourner la poignée, et des magasins sont fermés à midi, étonnant ! »

Un roman français marquant ?

« Dora Bruder, de Patrick Modiano. J’ai du lire le roman en français pour un cours mais j’aimais le livre. Si je me souviens du livre correctement, j’aime la manière dont le mystère est résolu dans la première moitié. C’est original car la deuxième moitié est aussi un mystère, parce que pourquoi le livre continue après que le mystère est résolu? J’aime aussi comment les indices sont reliés l’origine de Dora Bruder. » [A travers l’enquête sur sa disparition, Patrick Modiano dresse le mémorial d’une jeune fille juive déportée à Auschwitz, mêlant à ses déambulations dans Paris ses souvenirs personnels.]

Un livre à nous conseiller ? 

« Je souhaite vous parler de Ella Minnow Pea, de Mark Dunn, un auteur américain. J’ai trouvé le roman par hasard dans une bibliothèque, en regardant la couverture du livre j’étais curieux de voir comment on pouvait jouer avec des lettres. Dans ma famille je jouais souvent à ce jeu où il faut trouver le maximum de mots avec 7 lettres tirées au hasard.

La langue permet la communication entre les gens, mais que se passerait il si les lettres et les sons eux-mêmes disparaissaient. Nous serions sans moyen de communiquer. Le roman Ella Minnow Pea utilise cette idée. Sur l’île de Nollop, l’écriture et l’épistolaire sont vénérées par la nation. Un ancien habitant de l’île a créé le pangramme, une phrase qui utilise chaque lettre de l’alphabet. Le pangramme plus connu en anglais est « The quick brown fox jumps over the lazy dog. » Pour immortaliser sa contribution, les citoyens ont créé une statue de cette phrase. Cependant, après 100 ans, les lettres ont commencé à tomber. En conséquence, le gouvernement a interdit l’utilisation des lettres. Vous pouvez voir la perte de lettres dans la façon dont les chapitres sont formés. Chaque chapitre est une lettre parmi les citoyens et sur le quotidien de l’île.

Au début, on peut voir la première chute d’une consonne peu utilisée. Cependant, après la chute de plus de consonnes, la peur de perdre une voyelle augmente. Les voyelles sont si importantes que la perte d’une voyelle peut détruire la langue. Le gouvernement devient dictatorial et chaque personne qui utilise une lettre interdite trois fois est bannie ou tuée. De plus, tous les livres sont remplacés par des versions plus récentes avec des lettres approuvées. La perte de communication et des connaissances sont effrayantes. La seule façon de retourner l’utilisation de toutes les lettres est si quelqu’un peut proposer un pangramme plus court que l’anagramme. Sinon, l’île va perdre tous ses habitants et son histoire.

La version française s’intitule L’Isle Lettrée traduit par Marie-Claude Plourde. Elle utilise le pangramme français, « Portez ce vieux whisky au juge blond qui fume. »

 

Merci Deon !