Bien qu’Ulysse ait longtemps été proscrit en Irlande – trop choquant et anti-irlandais selon la » bonne société » – le personnage principal du roman de James Joyce, Leopold Bloom, a donné son nom au » Bloomsday « . Depuis les années 1970, chaque 16 juin, des passionnés font revivre ce jour » ordinaire » aux Dublinois : lectures, récits et théâtre de rue ont pour thème l’œuvre de Joyce, en soulignant notamment ses aspects burlesques, avec par exemple des déguisements colorés. Grâce à cette manifestation aux aspects parfois frivoles, il s’agit de dire aux Dublinois : » N’ayez pas peur de Joyce ! Les érudits ont dressé trop de barrières. Il y a trop de prétention alors que le message de Joyce s’adresse à tout le monde ! « .
Si vous pensez aussi que l’Ulysse de Joyce n’est pas pour vous, voici qui vous fera peut-être changer d’avis !
Une journée entière de déambulation, ça peut arriver à tout le monde
Construit en dix-huit épisodes écrits dans des styles différents, ce roman raconte les déambulations, les élucubrations et pensées intérieures de Leopold Bloom et Stephen Dedalus lors d’une seule journée, celle du 16 juin 1904. Au travers du quotidien de ces deux hommes, James Joyce dépeint une réalité banale très proche de l’humain. Dans leurs divagations, les protagonistes explorent les recoins de leur existence : de la mort à la vie, en passant par le sexe, l’art, la religion et la situation de leur pays. Calqué sur l’ »Odyssée » d’Homère, le roman figure et parodie les voyages d’Ulysse par les déplacements de Leopold Bloom, un petit employé juif, dans la ville de Dublin. Télémaque devient Stephen Dedalus, un jeune poète irlandais, tandis que Pénélope est Molly Bloom, la femme de Leopold.
Peut-être pour comprendre l’œuvre faut-il s’imaginer soi-même vivre une journée normale à Strasbourg ? Il est 8 heures ce 20 juillet 2022 : se lever le matin dans une colocation pas loin des Ponts couverts, au petit déjeuner une discussion sur les langues régionales en Europe, le projet de passer à la BNU, se mettre en route vers l’Hopital civil… Chacun des moments vécus au cours de cette journée sera décrit différemment selon les lieux traversés et les gens rencontrés, courant de conscience en longeant les quais, dialogues très familiers avec des potes… Il y aura des réminiscences, des choses vues et entendues que vous allez digérer de différentes manières, votre journée sera banale mais tellement pleine de fluctuations !
Suivez le guide !
Beaucoup de jours, d’après Ulysse de James Joyce a été recommandé par l’une des participantes du club de lecture de la médiathèque Malraux en avril dernier. Celle-ci avait décidé de s’attaquer à Ulysse, monument de la littérature du 20è siècle, dans une main, en le lisant avec l’ouvrage de Philippe Forest dans l’autre main.
« Philippe Forest démontre avec aisance et clarté qu’il est possible de lire et de donner à lire un pareil ouvrage. Il propose un guide pour ce livre-labyrinthe qu’est Ulysse et, en même temps, un essai très personnel dans lequel le lecteur qui le souhaite retrouvera l’écho de certains des romans de l’auteur de L’enfant éternel, de Sarinagara et du Chat de Schrödinger. Car Ulysse est un grand roman qui, dans ses dernières lignes, fait résonner le splendide « oui » à la vie de son héroïne, un ouvrage toujours aussi actuel qu’essentiel, destiné à tous les lecteurs de bonne volonté et qui offre à chacun la chance d’un formidable rendez-vous avec lui-même. » (Gallimard, réédition 2021).
« Cinq conseils pour parvenir à lire Ulysse »
C’est ce que vous propose Jacques Aubert, professeur émérite des Universités et éditeur de James Joyce en Pléiade, à écouter dans un excellent podcast de France inter. La recette est très simple et décomplexante :
1. Ne pas commencer par le début (oui tiens, pourquoi pas ?)
2. Ne pas voir « Ulysse » comme un roman qu’il FAUT avoir lu (si je veux !)
3. Ne pas chercher à élucider toutes les allusions (ouf !)
4. Le lire en anglais… si possible ! (là, c’est quand même plus difficile)
5. Comparer ses échecs de lecture et leur trouver des points communs (on en a tous !).
Si tout cela ne vous a pas donné envie de lire Ulysse, ce n’est pas grave, au moins vous en savez un peu plus !
L’exposition « Following Ulysses » est présentée au 2ème étage de la médiathèque André Malraux jusqu’au 25 aout (horaires d’ouverture ici).
A suivre : Après Ulysse, embrasser la cause humaine.
21 juillet 2022 à 18h15
Merci pour l’humour et la déculpabilisation / désacralisation de classiques qui font peur ! C’est le seul article à ce jour qui m’ait donné envie de (peut-être) lire Ulysse de Joyce. J’attends aussi que Philippe Forest écrive un livre pour aider à lire Proust 🙂